Les incendies ne constituent pas une particularité de notre époque. Sans remonter à l’histoire ancienne du feu sur nos territoires, les archives nous révèlent des descriptions d’incendies en garrigue au siècle passé par exemple. Ce sont les facteurs d’occupation du sol, de conditions météorologiques, mais aussi de relations avec les activités humaines et de représentations que l’on se fait du feu qui ont évolué et continueront à évoluer au cours du temps.
Un incendie accidentel de garrigue à Puéchabon en 1848
Auteur : Jean-François Lalanne d'après les archives départementale de l'Hérault (1)
Date : novembre 2013
“Nous sommes le 29 juillet 1848 et le tarral (2) souffle autant qu’il peut. L’inspecteur des eaux et forêts et son sous-directeur sont occupés à arpenter une partie des bois communaux promis à la coupe, situés à la plaine de Montcalmès. [...] Vers 3h de l’après-midi, ils aperçoivent une fumée à la couleur caractéristique qui provient du reste des communaux de Puéchabon. Aussitôt ils se rendent au mas de Lavène et de là ils voient que le bois des Roses est la proie des flammes. Tous les hommes du mas sont requis et l’un d’eux est envoyé à Puéchabon afin de chercher de l’aide qui arrive vers 5h et, sous la direction de l’inspecteur des forêts ils attaquent le feu dont ils se rendent maîtres vers 7h. Une quarantaine d’hommes sont restés sur place pour surveiller le feu mais le lendemain, mal éteint, il a repris, à 3h30 il était sous contrôle et éteint à 4h.
Le feu est l’affaire de tous et parmi les volontaires il y avait le maire, bien sûr, mais également le curé, le médecin, le receveur de la commune et de très nombreux habitants. Le 29 juillet ce sont 45 hectares qui ont été la proie des flammes et 12 hectares le lendemain.
La justice est saisie du dossier et demande une enquête au bureau de police d’Aniane afin de savoir si l’incendie est accidentel ou criminel.
Le 9 août l’inspecteur des eaux et forêts écrit au préfet à propos de l’enquête. Le feu avançait sur un front d’un kilomètre et demi. Poussé par un vent violent il n’a brûlé que des herbes et les branches basses des cépées de chênes verts. En recherchant les causes du sinistre, il a trouvé, sur le chemin de Viols-le-Fort 5 kg de charbon de bois et les restes d’un sac en partie brûlé.
Le lendemain, il a appris que juste avant le début de l’incendie quatre bêtes de somme sont passées et elles transportaient des sacs de charbon de bois que l’on venait de décharbonner (3) . Le muletier s’aperçoit que l’un des sacs brûlait et soucieux de sa bête il l’a jeté puis il a tenté d’éteindre le feu, n’y parvenant pas, pris de frayeur il s’est enfui chez lui où il dut se mettre au lit. [...] L’inspecteur s’est présenté chez lui pour l’interroger mais il fut prié de ne pas chercher à le voir ainsi pour ne pas aggraver son état. L’inspecteur n’insiste pas ; de toute façon la preuve que l’incendie est accidentel n’est plus à faire.”
(1). Cote : archives départementales de l’Hérault 7 M 1143
(2). C’est ainsi que l’on nommait le vent du nord à cette époque.
(3). C’est l’opération qui consiste à ouvrir la meule quand le charbon est cuit et à l’étaler avant de le mettre en sac.
Les effets du changement climatique sur les feux de forĂŞt
Auteur : Jacques Grelu
Date : novembre 2013
Entre 2008 et 2010, une mission interministérielle a étudié les conséquences du changement climatique sur l'impact économique (ou le coût) des incendies. L'étude s'est basée sur l’évolution des facteurs climatiques, la sensibilité de la végétation aux feux de forêt, les coûts de la gestion du risque et leur évolution.
L’évolution des températures a été mesurée par Météofrance sur plusieurs décennies dans des conditions scientifiques rigoureuses. Celle-ci révèle une hausse de 1,5° depuis 1958, ce qui a priori paraît faible. La végétation est insensible à cette hausse en période nocturne et pendant les saisons tempérées. La moyenne de 1,5° résulte essentiellement des pics de chaleur et de sécheresse avec des écarts thermiques bien supérieurs comme à l’été 2003. Les plantes en limite de leur aire écologique disparaissent vite par effet de stress hydrique ou de crises sanitaires. Les essences thermophiles aptes à coloniser les vides ne s'implantent naturellement que lentement. L’espace naturel vacant se charge alors d’une biomasse combustible (bois morts, friches mal boisées). Cette dérive induit une extension des zones sensibles à l’aléa feu de l’ordre de 30% à l’horizon 2040. La prévention des incendies deviendrait peut- être nécessaire jusqu’à la hauteur du grand arc ligérien avec une hausse des coûts de 20%. Les réseaux de pistes, d’eau tactique, de patrouilles ne peuvent être multipliés à l’infini. Une réflexion sur l'aménagement du territoire (urbanisme diffus, désertification agricole, etc.) est nécessaire et urgente.
Commentaire de la carte "Aléa incendie en 2011"
L’aléa incendie correspond à la probabilité d’occurrence d’un feu sur une zone géographique définie. Il est calculé en croisant plusieurs facteurs : l’inflammabilité due notamment à la sensibilité de la végétation et à sa structure, la combustibilité qui correspond à la quantité de matière combustible présente et enfin l’exposition, notamment au vent et à la pente.