Entre ruralité et urbanité, à la recherche d'une nouvelle identité
Auteur : Jean-Paul Volle
Date : novembre 2013
Vivre en garrigue interroge. Loin des images héritées, des modes de vivre accrochés à la terre et à la petite ville, la vie en garrigue traduit, aujourd’hui, les façons d’être du périurbain dans des espaces de nature fortement identitaires, mais aussi les liens qui unissent les petites communes aux capitales voisines. Terre de désir, la garrigue voit ses ambiances modifiées par les apports de nouvelles populations largement
dépendantes des migrations quotidiennes vers leurs lieux de travail.
Habiter en garrigue c’est affirmer le choix d’un cadre de vie, mais c’est aussi “basculer” dans le monde des mobilités contraintes, pour le travail, les loisirs, les services spécialisés, les consommations élémentaires. Les traces de la ruralité s’effaceraient- elles au profit des modes reconnus de la périurbanisation ? Rien n’est moins sûr dans ces espaces où les rencontres confortent les relations entre la ville et la campagne, entre l’urbain que l’on dit “importé” et le rural que l’on se représente comme ancrage dans la solidité des héritages. Ne convient-il pas dès lors de penser ces terres de garrigues au filtre de la modernité comme un “tiers-espace” pour reprendre l’expression de Martin Vanier(1) , ni un espace de la nostalgie, ni celui de l’intensité urbaine, mais un monde d’hybridations, d’intermédiations où doivent pouvoir se construire les inter-territorialités de demain, où les recompositions à l’œuvre donnent sens aux formes de réappropriations souvent sélectives, aux tensions des attaches urbaines, mais aussi aux formes les plus novatrices de régénération rurale. La garrigue comme toile de fond des métropoles régionales, s’affiche comme “tiers-espace” car s’y élaborent de nouvelles façons d’être, s’y nichent les déclinaisons du périurbain, s’y construisent les lignes de force des trajectoires résidentielles en même temps que sont stimulés les rapports à la nature et à la mise en valeur agricole. Entre dépendance et autonomie, concurrence et complémentarité, tensions entre ruralité et urbanité, le tiers- espace des garrigues prend corps. Le renouveau très récent des petites villes intermédiaires tant au niveau de leur activité que de leur attractivité, la réouverture de marchés hebdomadaires, le développement des espaces de télétravail et de locaux partagés entre travailleurs indépendants... sont autant d’indicateurs qui témoignent de ces mouvements de reconquête et recomposition.
La garrigue est là , riche de son histoire, de ses histoires, mais aussi de ses trajectoires porteuses d’innovation, d’ouverture et de renouveau.
Cartes et illustrations